En période de crise, c'est quand même rassurant de voir à quel point les hommes politiques et responsables de tous bords se penchent sur les vrais problèmes des vrais gens. C'est vrai quoi : on compte un million d'enfants pauvres en France, un chômage exponentiel, un salariat précarisé toujours davantage, la méfiance, voire la haine qui s'installe confortablement entre catégories de la population, les jeunes diplômés qui sont toujours en stage à 35 ans, l'industrie morte, l'espérance éradiquée, l'école sinistrée, les retraites qui implosent, le système de santé au bord du gouffre, les prisons débordées, nos soldats qui se font tirer comme des lapins dans une guerre ingagnable qui n'est même pas la nôtre, mais tout va bien, nos responsables sont à la barre, et croyez-moi, ils ont les solutions qui décoiffent.
L'une de ces solutions, prise courageusement par notre administration, est de faire cesser cette intolérable discrimination qui fait que l'on appelle les jeunes filles « mademoiselle », et les femmes mariées « madame ».
Valérie pourra continuer d'élever seule ses deux enfants avec moins de 1000 euros par mois, mais elle aura la satisfaction de voir que l'huissier venu chez elle saisir son mobilier l'appelle Madame et non Mademoiselle.
Stéphanie ira bien avorter sous la menace de son petit ami, déjà marié, mais au moins les médecins tueront son bébé en l'appelant Madame.
Véronique continuera de travailler à temps partiel dans un supermarché, sans pouvoir rentrer chez elle pendant la pause de 6 heures imposée par son employeur, ce qui la fait quitter son domicile à 5h le matin et rentrer à 21h, mais elle sera une Madame.
Quant à Virginie, elle continuera d'être payée 20% de moins que son subordonné Clément, mais il ne l'appellera plus Mademoiselle, et ça, franchement, ça change sa vie.
Ce qui est chouette, c'est qu'à l'approche de l'élection présidentielle ce genre de mesures courageuses est prôné par la quasi-totalité des candidats.
Si Hollande est élu, les gens auront le droit de se suicider (alors qu'avant ils n'avaient pas le droit, hein), mais avec l'aide de leur médecin, ce qui est nettement plus convivial.
Si Sarkozy repasse, les gens auront le droit de travailler, grâce à un référendum qui va résoudre le problème du chômage, avec cette question qui renferme la solution ultime à la paupérisation galopante de la société : « Pensez-vous que ces salauds de pauvres doivent aller bosser à coups de pied au cul au lieu de glander devant TF1 pendant que les travailleurs les entretiennent ? »
Je vous le dis, vivement le mois de mai. On va voir ce qu'on va voir.